Les pays coupés

Entre clairères suspendues et vallées profondes

C’est le paysage entre-deux, entre le haut et le bas, entre la Limagne et le Haut-Livradois. C’est le pays des vallées secrètes et encaissées. On passe de l’isolement et du repli aux plateaux suspendus ouverts sur les lointains. C’est le pays aux deux visages

« Quand, montant vers les plateaux, on arrive à quelques kilomètres de l’horizon, on voit enfin les gorges s’élargir. Désormais, cette topographie morcelée fait place à un paysage délicatement façonné. Chaque tête de vallée se ramifie en éventail de combes, entre lesquelles des éperons larges et doux portent, sur leurs replats étagés, des couronnes de fermes, de hameaux, de villages. »
Lucien Gachon

Les rivières ont découpé les balcons du Livradois sur sa façade ouest en donnant l’image précise d’un réseau en forme de peigne. Une dizaine de petites vallées encaissées et courtes déchire ses pentes boisées en débouchant à proximité de l’Allier. Les ruisseaux coulent parallèlement d’est en ouest en isolant les épaulements cultivés, les uns par rapport au autres. Ce sont les pays coupés.

Seules les vallées du Doulon et de la Sénouire adoptent à leur naissance une course nord sud. Les vallées les plus ouvertes ont accueilli dans leur fond l’activité agricole. Des langues de pelouse, de tous petits prés et des arbres de bord de rivière signalent le lit du ruisseau rempli de poissons dorés et de loutres espiègles. Les versants trop abrupts sont couverts d’une végétation mélangée entre les pins, les chênes et les hêtres selon leur altitude et leur exposition. De nombreux affleurements rocheux sont marqués par des lieux de vie où se sont accrochés les châteaux pittoresques et certains hameaux et villages.

La vie humaine, si l’on excepte les moulins, a fui les fonds frais et étroits
pour s’installer sur les rebords du plateau granitique en balcon et sur les têtes de vallée. Tâches claires autour de fermes isolées, hameaux ou villages, les poches habitées, organisées en clairière, se répondent de clocher en clocher. Elles accueillent une activité agricole encore dynamique favorisée par les influences climatiques de la Limagne. Ces alvéoles cultivées, aux parcelles étendues et aux belles silhouettes villageoises contrastent avec la profondeur des vallées encaissées à la nature luxuriante et aux richesses patrimoniales dissimulées. Un double visage pour ce pays de transition qui doit aujourd’hui faire valoir sa richesse insoupçonnée.